Cette petite rivière longue d’une centaine de kilomètres
termine sa course peu après La Coudère, là où, après être passée sous le vieux pont
métallique du Bec d’Oudon, elle se jette dans la Mayenne.
L’Oudon a rythmé nos années d’enfance. Les trois mois de vacances d’été que nous accordait généreusement le gouvernement de Guy Mollet étaient centrés sur ce petit coin de paradis qui coulait tranquillement au bout du champ, en face de la Coudère.
L’Oudon a rythmé nos années d’enfance. Les trois mois de vacances d’été que nous accordait généreusement le gouvernement de Guy Mollet étaient centrés sur ce petit coin de paradis qui coulait tranquillement au bout du champ, en face de la Coudère.
Nous avons passé des heures chaque jour, matin et
après-midi, à nous baigner dans cette rivière un peu verdâtre, avec nos cousins
Desprez de la Carrière et du Tertre, au milieu des grenouilles et des
poissons-chats.
Quand nos jeunes voisins du château de l’Isle Briand étaient
là, ils nous rejoignaient au milieu de l’Oudon, venant de la rive gauche, nous
de la droite. Leur grand-mère, la comtesse de Trédern, se terrait dans son
château et ma grand-mère Marguerite Meulle m’avait avec complicité appris à
faire le baise-main, de façon à ce que je sois agréé par la châtelaine quand je
venais, adolescent, tourner autour de sa petite-fille Isabelle.
Mon grand-père Georges Meulle avait parfois failli inconsciemment
gâcher ces innocents flirts en s’énervant contre les oies de la ferme de l’Isle-Briand
qui traversaient l’Oudon et venaient s’ébattre sur les prés de la Coudère. Il
prenait alors son fusil de chasse et tirait en l’air pour les chasser, sans
trop d’efficacité.
L’Oudon, ce sont aussi les bateaux de la famille.
La barque de mon grand-père sur laquelle on greffait un
petit moteur nous descendait jusqu’au Bec d’Oudon, virait à gauche et remontait
la Mayenne jusqu’à l’Aubinière. On y allait avec nos cousins de La Carrière et
ma mère disait à Tante Hélène : « si on coule, tu en prends 3 et moi
aussi », ce qui avait le résultat de me terroriser, ne voyant pas en cas
de naufrage comment nous pourrions nous agripper avec efficacité à ces deux
mères de famille nombreuse.
Le canoë des Desprez du Tertre était entreposé à l’Aubinière
où nos cousins de l’intérieur des terres venaient parfois se baigner et
profiter comme nous de cette modeste base nautique aujourd’hui disparue. J’admirais
ce beau canoë fin que je qualifiais de « bateau d’indiens ».
Il y eu aussi les bateaux de mon oncle Jean-Paul Meulle, sa
prame en bois verni que je trouvais si maniable à la godille et puis son
magnifique Zodiac pour lequel il dépensa une fortune en essence à faire faire
du ski nautique à tous ses neveux et cousins, au grand dam des pêcheurs aigris
étalés le long du chemin de halage.
Enfin, il y avait ce magnifique canoë tout en bois que mon
grand-père me confiait. Ce n’était pas un canoë comme les autres, il avait la
particularité d’avoir une double dérive latérale amovible et une voile
triangulaire latine. Je me souviens des dizaines de fois où je remontais à la
voile jusqu’au Lion d’Angers ou descendait l’Oudon puis la Mayenne jusqu’au
barrage de Grez-Neuville. Après la disparition de mes grands parents, mon
cousin Antoine Desprez a gardé et entretenu ce canoë. A chaque fois que nous
nous voyons, je lui dis « c’est le canoë de mon grand-père », il me
répond « c’est le canoë de mon oncle ». Nous avons tous les deux
raison.
Jean-Francois MONTIN
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